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Pierre philosophale
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28 mars 2007

La violence

Retranscription de la discussion autour de la question :

« La violence est-elle inhérente à l’homme ? »

Participants : professeurs des écoles inscrits au stage "l’oral en SEGPA".
Cette question a été choisie par le groupe après la lecture d’un passage du roman « Mischa » de N.Côté et M.Sasseville (p66 à 70), conformément à la méthode de Matthew Lipman

L’homme est-il par nature violent ou le devient-il au cours de son existence ?

Qu’est-ce que la violence ? Est-ce que c’est un comportement qui caractérise l’homme ?

Il faudrait sans doute s’entendre sur ce que l’on appelle violence : ce qui est vécu comme violent aujourd’hui ne l’était pas forcément à d’autres époques de l’histoire ou dans d’autres civilisations. Il y a ainsi une relativité importante quant à la perception de la violence.

Oui ! Cela semble évident : la violence est inhérente à l’homme ! On peut d’ailleurs observer un parallèle étonnant entre l’histoire d’un homme et celle de l’humanité, entre le déroulement d’une vie et l’accomplissement d’une société…

Peut-on réellement dire que la violence est inhérente à l’homme ? Ne devrait-on pas plutôt dire qu’elle est inhérente à la situation d’un homme en particulier ? C’est la situation d’un homme qui détermine sa violence et non le fait qu’il soit humain…

De tout temps, les civilisations ont été obligées de recourir à la violence pour survivre…

En fait, la violence est présente partout, que ce soit dans le règne animal ou chez l’homme : il n’y a pas d’animal non-violent ; le seul être capable de non-violence est l’homme justement, parce que c’est un être pensant et qu’il peut ainsi agir sur ses pulsions.

Il faudrait revenir à la définition de la violence : la violence, c’est surtout lorsqu’on empiète sur le territoire de l’autre pour le déposséder, et cette intrusion dans son territoire  peut-être vécue comme un viol… Si la violence existe, c’est sans doute à cause du monde : dans un monde parfait, la violence existerait-elle ?

Mais, au fond, la violence est-elle forcément négative ?

La parole aussi peut être le véhicule de la violence et, paradoxalement, la non-violence peut être perçue comme un acte de violence…

On peut aussi se poser la question de savoir si une civilisation évoluerait si elle n’était pas confrontée à la violence ? Est-ce que ce ne serait pas, en fin de compte,  une forme de régulation ?

A la question « La violence est-elle forcément négative ? », on peut répondre oui d’une manière absolue parce que la violence est toujours une dépossession.

Parfois la violence est une nécessité.
Les mots peuvent faire mal et quel intérêt y  a-t-il à toujours se maîtriser ?

Il semblerait tout de même que l’on évoluerait mieux dans un pays en paix que dans un pays en guerre…

Peut-être, mais n’empêche qu’un temps de paix, ce n’est jamais qu’un moment entre deux guerres !

Il existe pourtant une expression où la violence est positive : « se faire violence »…

Chez les animaux, la violence est toujours en réponse à une situation : elle n’est jamais, ou alors très rarement, gratuite… Si justement l’homme est un être pensant, c’est qu’il doit être capable de trouver d’autres réponses aux situations que la violence.

Jean-Jacques Rousseau disait que l’homme naissait naturellement bon et que c’était la société qui le pervertissait…Mais non, absolument pas, l’homme n’est pas naturellement bon, c’est seulement grâce à l’éducation qu’il peut devenir bon…

Les animaux ne sont violents que pour se protéger ou pour se nourrir alors que l’homme est capable de commettre des violences terribles sans raison aucune, surtout si l’on songe aux génocides et aux tortures commises à ces occasions…

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Commentaires
G
C'est en cherchant mon propre site http://pierrephilosophale.spaces.live.com)que je suis tombé sur cette page, salutations à vous et bravo pour cet effort de promotion de la philo qui en a bien besoin.
G
Un peu rapide cette analyse et aussi cette définition que vous donnez de la violence. Il me semble que la violence dépasse largement le simple empiètement sur le territoire de l'autre mais est à comprendre comme un mode de relation (à plusieurs sens donc) qui entraine une atteinte à une essence, c'est à dire qui n'est pas conforme à ce que les essences qui entrent en relation sur ce mode, nécessitent pour ne pas être altérées. En ce sens un rapport sexuel non consenti est un viol et une violence car il est de l'essence des personnes en présence d'avoir des rapports consentis sinon elles ne sont plus envisagées que comme simples objets. En outre si la violence est une altération de l'essence de celui qui la subit elle est aussi une altération de celui qui la commet. Le violeur porte atteinte à sa propre essence en ne respectant pas l'autre personne et ne se comporte plus lui même comme une personne, puisque la notion de personne implique la reconnaissance et le respect d'autrui.<br /> <br /> Prise en ce sens la notion de violence s'applique difficilement à la nature, le prédateur n'est pas violent en tuant sa proie car il agit conformément à son essence de prédateur. Bien que la proie subissent ce que le langage courant appellerait une violence je tendrai à la considérer comme une simple brutalité. C'est à dire une relation certes destructrice pour celui qui la subit mais qui ne porte pas atteinte à ce qu'il est essentiellement. Pour illustrer mon propos il me semble qu'un lion égorgeant une gazelle n'est pas violent alors qu'un élevage industriel de poulet l'est, les poulets en ce cas ne sont plus du tout envisagé comme des animaux mais seulement comme de la viande. <br /> On le voit bien pour qu'il y ait de la violence il faut qu'il y ait de la conscience. Plus exactement il faut qu'il y ait la possibilité "d'envisager" l'essence de l'autre dans la relation qui s'établit avec lui. Les animaux n'ayant pas cette dimension de la conscience d'une essence ne sont donc jamais violents (même s'ils empiètent sur le territoire d'autres animaux).<br /> <br /> La violence serait donc liée à l'humanité mais de là à dire qu'elle est inhérente à l'homme il n'y a rien d'évident. L'inhérence signifie quelque chose comme "attaché à une essence", la violence serait donc attachée à l'essence de l'homme mais par quel lien cet attachement se fait-il?<br /> <br /> La violence en tant qu'elle est un mode relationnel qui porte atteinte à l'essence est en ce sens une négation de l'essence, elle ne peut donc être essentielle, c'est à dire inhérente à la nature de quoi que ce soit et donc à la nature tout court. Ce qui est cohérent avec ce que je disais plus haut: les animaux en tant qu'êtres naturels ne peuvent être de nature violente, mais les hommes non plus car eux aussi ont une essence. On se retrouve donc avec un paradoxe: il n'y a de la violence que par l'homme mais l'homme n'est pas de nature violente car la violence étant par définition une négation de l'essence elle ne peut être essentiel à aucun être. <br /> La solution est à chercher du côté de la liberté humaine qui est un pouvoir de se déterminer et donc de nier cette essence qui serait la sienne ou celle d'autrui si ça lui chante. l'inhérence de la violence à la nature humaine (l'attachement) se ferait donc selon un lien très particulier qui n'est pas celui du caractère essentiel mais d'un caractère accidentel rendu possible par ce caractère (pour le coup essentiel) de la liberté humaine.<br /> <br /> La notion d'inhérence ayant très souvent le sens "d'essentiel à", ne peut donc s'appliquer à la violence en ce qui concerne quoique ce soit, la violence est toujours une anomalie et ne relève d'aucune essence mais au contraire de la perte de cette essence. La violence n'est donc pas inhérente à l'homme et c'est même assez grave de dire cela car c'est ne pas faire la distinction entre ce qui est de l'ordre du mal et ce qui n'est que la sauvagerie naturelle qui demeure innocente malgré sa brutalité. Cela car il est à remarquer au passage que cette notion de violence soulève les mêmes problèmes que celle du mal, et que sans doute la violence et le nouveau nom que l'on donne aujourd'hui à cette notion de mal trop connotée pour des esprits qui se veulent "modernes".<br /> <br /> Quant à l'espression "se faire violence à soi-même" elle est tout simplement mal comprise (sauf dans le cas du suicide ou de l'automutilation gratuite), il s'agit plutôt de faire violence à sa paresse ou à sa peur que l'on identifie alors abusivement à soi-même.<br /> <br /> Voilà, mais ce n'est là qu'une proposition de définition et des petites analyses bien imparfaites qui en découlent, tout cela est évidemment sujet à discussion... J'espère que les multiples problèmes que pose ma manière de voir les choses ne vous ont pas échappé... ;)
Pierre philosophale
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