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Pierre philosophale
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18 mars 2006

Au salon du livre

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Cet après-midi, je suis allé au salon du livre pour assister au débat au Studio de Radio France auquel participait l'un de mes amis, Gilles Geneviève, (à droite sur la photo).

A gauche et de dos, Michel Onfray, en face de lui Luc Ferry et Anissa Castel-Bouchouchi. Si j'y suis allé, c'est surtout parce que le thème au programme du débat m'est particulièrement cher :

- Peut-on philosopher avec des enfants et des collégiens?
- Peut on faire aimer la philosophie bien avant la classe de terminale ?

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Mais quelques instants après le début de l'émission, le plateau est envahi par des étudiants qui veulent prendre la parole et s'exprimer contre le CPE. Il s'ensuit quelques moments d'une exceptionnelle intensité où Jean-Pierre Guéno fait tout ce qu'il peut pour calmer les intervenants qui se sont invités en dernière minute. L'incertitude plane sur la poursuite du débat, surtout quand Luc Ferry leur fait remarquer que s'ils se trouvaient en Chine, ils auraient été évacués dans les trois minutes par la police et qu'ils risqueraient plusieurs années de prison pour un tel coup d'éclat... Des femmes dans le public frisent l'hystérie en leur criant : "enfants gâtés ! Sortez ! Quittez le plateau ! Un peu de respect ! On est venu de loin !"

Là, c'est franchement devenu houleux, avec des échanges peu amènes entre étudiants et public, et puis, finalement, Jean-Pierre Guéno trouve le bon argument : les jeunes, dans l'intérêt de leur cause, feraient bien d'écouter la suite, surtout ce que va dire Michel Onfray, qui n'est peut-être pas du même avis que Luc Ferry...

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En effet, très habile, Michel Onfray  retourne très vite la situation, en suscitant les applaudissements des étudiants et d'une partie du public, sans déchaîner bizarrement les protestations et la colère des plus excités de l'assistance. La foule, quelques secondes auparavant très hostile, semble maintenant acquise à la légitimité de la protestation. La foule a toujours été versatile mais  c'est quand même du grand art... Luc Ferry traite Michel Onfray de démagogue : la tension s'est déplacée et du coup le débat a pris son essor. Il s'est poursuivi ensuite normalement, sans autre interruption, et sans apporter d'ailleurs d'éléments très nouveaux, à part peut-être la confession finale de Luc Ferry sur l'impuissance de l'homme politique d'aujourd'hui dans un monde fou que plus personne ne peut encore maîtriser, même les dirigeants. La machine s'est emballée et on ne sait plus comment reprendre le contrôle. Je l'ai trouvé à cet instant précis terriblement sincère et ce qu'il a dit là, j'en avais la très nette impression depuis longtemps.

Personne n'ose l'avouer. Mais on en est là. Une fin de régime... La mort d'une époque... Et quoi ensuite ?

Vous pourrez l'écoutez sur le Web de Radio France, quand il sera monté et mis en ligne.

On sait que plus rien ne va, mais que faire ? J'en parlais justement ce jour-là...

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Commentaires
J
Merci beaucoup Claire : ces réponses méritaient vraiment d'être reranscrites ici. On peut les féliciter pour la qualité de leur réflexion. A bientôt.
C
Je suis impatiente d'écouter l'émission ! J'aurais bien aimé être là pour entendre Ferry et Onfray disserter sur la possibilité de philosopher avec les jeunes générations... <br /> <br /> Je viens de recevoir le bilan de l'expérimentation que nous avons menée au collège de Vouillé avec des élèves de troisième (24 questionnaires remplis un mois après la séance + synthèse de Mme Beneteau, prof. d'anglais) : c'est vraiment très positif ! <br /> Je livre les réponses de nos adolescents à la question introductive "1. Imaginez que votre petit frère de huit ans vous demande ce qu’est la philosophie. Que lui répondez-vous ?".<br /> Bonne lecture !<br /> <br /> « Ecoute petit frère, tu verras cela plus tard. La philosophie c’est l’art de contrôler, maîtriser son esprit, ses pensées et ses représentations. Il faut réfléchir sur toutes les choses que l’on perçoit. » <br /> « Je lui explique que nos pensées s’appellent aussi des représentations, et que la philosophie, c’est la maîtrise de nos représentations ou plutôt les philosophes essayent de contrôler leurs pensées. » <br /> « Un philosophe est une personne qui pense et réfléchit ses gestes, il examine les situations et essaye de comprendre pourquoi nous les faisons. »<br /> « Je lui réponds que c’est une façon de vivre dans la tête des gens. » <br /> « La philosophie, c’est une profession qui consiste à voir les choses sous un autre angle, de façon plus calme, plus attentive… »<br /> « La philosophie, c’est la façon de prendre en compte ses sentiments, ses pensées, pour agir différemment. »<br /> « La philosophie est une matière qui sert à réfléchir avant d’agir. C’est un travail réfléchi. On doit se poser des questions à laquelle on doit répondre en étant philosophe. » <br /> « La philosophie, c’est de penser à ce que les autres ne pensent pas. »<br /> « Je lui répondrai qu’un philosophe est une personne qui a le contrôle de son corps, de son esprit et qui réfléchit avant de faire quoi que ce soit, avant de faire une action. »<br /> « C’est une matière qui permet de mieux faire attention à ses pensées, à ses représentations. » <br /> « Que les philosophes étudient les manières des hommes, ce qui est juste ou pas juste et vivent au jour le jour en profitant de l’instant présent. »<br /> « Pour moi, un philosophe est une personne qui cherche des choses compliquées, c’est-à-dire qu’il va se poser des questions où la réponse est difficile à donner. »<br /> « La philosophie est réservée aux sages et je pense que toi, mon petit frère, n’est pas prêt. La philosophie est un état d’esprit qui permet de réfléchir à ce qu’on pense. »<br /> « C’est de la réflexion, le fait de réfléchir avant d’agir, de penser à ce que l’on va faire ou ce que l’on a fait. »<br /> « La philosophie est une pratique qui sert à comprendre, à comprendre ce qui nous arrive et à le maîtriser. »<br /> « Je lui dirais que c’est quelqu’un qui ne pense pas comme nous, il a une autre pensée des choses. »<br /> « Je lui réponds que la philosophie est une autre manière de penser. »<br /> « La réflexion sur tout ce qui nous entoure. »<br /> Je lui dit : « C’est quand on s’intéresse à tout, mais c’est trop compliqué pour toi, pour l’instant. » <br /> <br /> Et peut-être la plus belle pour finir : <br /> "Je lui réponds que c'est une façon d’agir et de penser assez complexe et différente des autres mais intéressante. Une manière d’être bien à l’intérieur de soi. »<br /> <br /> Une manière d'être bien à l'intérieur de soi...<br /> <br /> Qu'avons-nous besoin de plus ?<br /> <br /> A bientôt !
J
Bien sûr Valérie, tu as entièrement raison. Mais c'est malheureusement le jeu du pouvoir, de l'ambition, de la carrière. Les hommes politiques qui accèdent aux responsabilités font partie d'un appareil qui produit ses élites, qu'il soit de droite ou de gauche. Et comme à l'école et dans toute institution aujourd'hui, les élites qui sortent de cette compétition exacerbée sont plus que jamais démunis car ils ont été brillants et se sont surpassés pour atteindre la ligne d'arrivée avant leurs petits camarades mais qu'ensuite ils sont épuisés, perdus, apeurés de ne pas paraître ce qu'ils sont censés être, de ne pas être jugé à la hauteur, d'autant plus que plus personne ne sait vraiment ce qu'il faut faire et comment il faut le faire. Tu as raison de dire qu'ils mentent mais moi-même quand j'étais directeur d'école, il m'arrivait souvent de mentir aux parents, aux collègues, aux supérieurs en leur faisant croire que je maîtrisais toujours parfaitement la situation alors qu'au fond de moi je me sentais souvent égaré : mais il ne fallait pas perdre la face. Il fallait être "professionnel" et cette exigence-là, dans tous les domaines, produit hypocrisie et mensonges.
V
J'apprécie la sincérité de Luc Ferry! Il avoue aujourd'hui que les dirigeants ne savent plus quoi faire face à une évolution "emballée" du monde!<br /> Si telles sont ses pensées, pourrait-il expliquer la démagogie des programmes politiques qui assurent détenir les clés: chômage, éducation, croissance...<br /> Ils assurent et de ce fait décrédibilisent les pouvoirs, ils mentent en toute impunité.<br /> Que ne rencontre-t-on pas un homme politique qui pourrait avouer ses incertitudes mais promettre tous les efforts?
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